La grippe aviaire ne connaît pas les frontières

May 16, 2020 Off By EveAim

La découverte du virus de la grippe aviaire en Roumanie et en Turquie relance les craintes d’une épidémie humaine à grande échelle. Malgré cette annonce, les autorités sanitaires européennes et mondiales refusent de céder à la panique. En France, les responsables gouvernementaux renforcent le plan de lutte contre cette menace.

Après la découverte du virus de la grippe aviaire en Turquie et en Roumanie, les autorités européennes refusent de céder à la panique, tout en s’avouant préoccupées… Et pour cause : selon l’Organisation Mondiale de la santé, les flambées actuelles dues à un virus grippal aviaire menacent très sérieusement de déclencher une pandémie de grippe humaine. Si un tel scénario catastrophe se produisait en France, 9 à 21 millions de personnes pourraient être infectées et 91 000 à 212 000 en décèderaient !
Turquie, Roumanie… le virus H5N1 s’attaque à l’Europe
Le 11 octobre, des cas de suspicion de grippe aviaire étaient déclarés aux portes de l’Europe :
– En Turquie, il s’agit d’un foyer important, détecté le 1er octobre. Il touche des élevages industriels qui ont enregistré en deux jours un très fort taux de mortalité. Les autorités turques ont pris des mesures adaptées : les oiseaux restants ont été abattus et l’exploitation a été désinfectée ; des périmètres de quarantaine ont été mis en place ;
– En Roumanie, il s’agit d’un petit élevage familial mixte dans lequel 40 canards et un poulet sont morts. Les autorités sanitaires roumaines ont abattu le cheptel et mis en place une zone de surveillance.
Après un peu de confusion, les analyses réalisées dans un laboratoire communautaire de référence au Royaume-Uni confirment qu’il s’agit bel et bien du même virus H5N1 qui sévit en Asie (1). Mais avant même la publication de ces résultats, l’Union européenne a interdit dès le 11 octobre à titre de précaution l’importation sur le territoire communautaire de tous les oiseaux et de leurs produits en provenance de Turquie. La Roumanie a pris des mesures internes similaires d’interdiction d’exportation. L’abattage d’un grand nombre de volailles dans ces deux pays laisse penser que les foyers ont été circonscrits, comme le soulignent les autorités sanitaires de ces deux pays. Malgré ces déclarations rassurantes, l’arrivée de ce virus a causé dans ces deux pays une ruée dans les pharmacies et l’épuisement du stock de l’antiviral Tamiflu ® en quelques heures… Mais en France, certains grossistes avouent même ne plus pouvoir faire face à la demande.
Pas de panique mais la prudence s’impose…
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) s’avoue aujourd’hui préoccupée et invite tous les pays concernés à renforcer la surveillance des volailles et… des hommes. Les ministres des affaires étrangères de l’union européenne vont se réunir le 18 octobre en séance extraordinaire pour aborder ce thème.
En France, les réactions des autorités sanitaires sont intervenues avant même le résultat des analyses (2). Le 12 octobre, les ministres de la santé et de l’agriculture ont saisi l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) pour lui demander d’analyser la situation et de formuler de nouvelles recommandations. Le 25 août 2005, l’Afssa avait jugé “faible“ le risque immédiat de contamination par les oiseaux migrateurs des poulets d’élevage en plein air et “nul à négligeable“ le risque d’introduction “directe“du virus par des oiseaux migrateurs en France à partir des foyers asiatiques. Seul le risque de contamination indirecte lié au retour en Europe d’oiseaux d’Afrique au printemps 2006 avait été jugé “réel“ (3). Mais la découverte du virus asiatique en Turquie et en Roumanie pourrait amener les experts à moins d’optimisme… La France devrait demander au niveau européen de renforcer la surveillance des oiseaux migrateurs et la protection des élevages. Par ailleurs, les ressortissants français vivant en Turquie et Roumanie ou les voyageurs qui souhaiteraient s’y rendre seront informés de la situation et de la nécessité d’éviter tout contact étroit avec des volailles (élevages, marchés aux oiseaux).
Vendredi 14 octobre, le Premier Ministre Dominique de Villepin qui réunissait les ministres concernés par ce dossier a rappelé “qu’à ce stade, il s’agit d’une maladie qui touche les volailles. Si on dénombre en Asie quelques cas de transmission des volailles à l’homme, il n’y a en revanche à ce jour aucun cas de transmission d’homme à homme : nous ne sommes pas en situation de pandémie (4)“. Au cours de cette réunion, le Premier Ministre a rappelé les mesures mises en oeuvre pour “ protéger la santé de tous les Français“. Ainsi avec 200 millions de masques de protection, 130 millions de doses d’antiviraux et des pré-commandes pour 40 millions de vaccins, la France est sur le papier l’un des pays les mieux préparés à un risque de pandémie. Mais comme le rappelait cette semaine un éditorial de la prestigieuse revue médical The Lancet (5), seule une transparence totale dans la préparation des plans de lutte nationaux et la surveillance du territoire permettront d’endiguer une pandémie grippale qui pourrait être aussi dévastatrice qu’en 1918.
Attention à ne pas faire d’amalgame entre épizootie aviaire et épidémie humaine cependant. Le virus H5N1 concernent principalement les personnes qui travaillent ou interviennent dans une zone contaminée : éleveurs, techniciens de coopératives, vétérinaires, équipes de nettoyage et de désinfection… Le principal danger réside dans la possible émergence d’un virus H5N1 “humanisé“ capable de se transmettre d’homme à homme. En attendant, le gouvernement se prépare et une actualisation du plan gouvernemental devrait être rendue public dans les prochains jours.
David Bême
1 – Communiqué de l’Organisation mondiale de la santé du 13 octobre 20052 – Communiqué de presse du ministre de la santé du 11 octobre 20053 – AVIS de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments relatif à l’évaluation du risque d’introduction par l’avifaune de virus Influenza hautement pathogènes et à l’évaluation de certains dispositifs de protection des élevages aviaires – 25 août 20054 – Communiqué du cabinet du Premier Ministre du 14 octobre5 – The Lancet, Current Issue, Volume 366, Number 9494, 15 October 2005Click Here: Rugby league Jerseys